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Le Chef de l’Etat a reçu au lendemain de la fête de l’indépendance, l’Ambassadeur ainsi que l’attaché militaire de l’hexagone près le Bénin. Si rien n’a filtré de leur entretien, tout porte à croire que la rencontre entre les diplomates français et le Dr Boni Yayi a un rapport avec les derniers patrouilleurs acquis par le Bénin dans le cadre de la lutte contre la piraterie. A cet effet, nous vous prions de lire cet article publié le 1er août 2012 par notre confrère Jacques Delacroix pour Africa 7tv et Mutations
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Le troisième patrouilleur commandé par l’Etat béninois pour faire face à la montée des actes de piraterie et à la criminalité le long de ses 140 kilomètres de côtes est arrivé ce dimanche à Cotonou, deux jours avant la fête de l’Indépendance. Mais les rafiots ne rassurent guère, dans la lutte contre les pirates du Golfe de Guinée...
JACQUES DELACROIX
Après l’Alibori et l’Ouémé, le Zou (chacun des bâtiments a été baptisé d’après le nom d’une province du pays) est arrivé à quai.
Mais la réception du premier patrouilleur de type FPB 98 MKI livré au Bénin avait été entachée d’un incident qui n’avait pas été du goût du président béninois : la veille de la cérémonie officielle de mise en service, l’appareil était tombé en panne. Tous les chargeurs de batterie avaient été grillés comme des beignets sur un feu trop puissant, remplacés, puis de nouveau cramés.
Le chef de l’Etat béninois en avait conçu un franc courroux et avait ainsi renoncé à présider la cérémonie, accusant, selon un habitué du Palais de la Marina, les crânes d’œuf du ministère de la Défense d’avoir été acheter « de la pacotille ». On ne peut rien lui cacher, c’est un visionnaire.
Retour sur les faits.
Pour faire face à la recrudescence des actes de terrorisme susceptibles de mettre en péril une économie qui dépend pour l’essentiel des activités portuaires, le Bénin décide de se doter de moyens de lutte appropriés. Première phase : s’équiper.
Dès 2009, des négociations sont engagées auprès de la compagnie française Ocea, qui dispose d’un chantier naval dans les Sables d’Olonne, en Vendée, un autre à Fontenay-le-Comte et le dernier à Saint-Nazaire. Les bureaux du constructeur français ne sont pas étrangers aux responsables des ministères de la Défense de plusieurs autres pays de la région. Sur les carnets de commande d’Ocea, figurent de gros clients comme le Nigeria ou l’Algérie…
Côté béninois, font partie de la délégation le ministre d’Etat, Kogui N’douro, l’actuel chef d’Etat-major de l’Armée de Terre, le général de brigade Zankaro Moumouni, à l’époque directeur de la Coopération Militaire et l’aide de camp du ministre de la Défense, le capitaine de gendarmerie Wilfried Dagnonhouéton.
Selon des sources proches d’Océa, les responsables de la compagnie française s’étonnent de ce qu’aucun spécialiste de la Marine béninoise ne fasse partie de la délégation. Un proche du dossier affirme à Paris qu’ils sont « venus négocier des patrouilleurs comme on va voir un artisan ébéniste pour se faire tailler une pirogue dans un arbre. »
Résultat des courses : des spécialistes interrogés par Afrika7 s’émeuvent du choix opéré par l’armée béninoise. Les patrouilleurs commandés, les fameux FPB98 MKI (acronyme de Fast Patrol Boat) sont inopérants pour le climat béninois. Ils sont dotés d’un système de propulsion à hydrojets considéré comme peu fiable, à cause de la chaleur et de l’humidité.
Ces appareils ont en effet la réputation de poser de gros défis en matière de maintenance, lorsqu’ils opèrent dans des climats hostiles. Un autre spécialiste interrogé par Afrika 7 confirme que des patrouilleurs à propulsion classique (hélices hors-bord, in-bord ou z-drive) auraient présenté le double avantage de la robustesse et du prix plus abordable.
Question prix, il faut dire que les Béninois n’ont pas lésiné sur les moyens. Selon des sources proches du chantier naval des Sables d’Olonne, les trois patrouilleurs auront coûté en tout une bonne quinzaine de milliards de Francs CFA au contribuable béninois, soit cinq milliards pièce…
Faut-il en conclure, selon la formule d’un leader de l’opposition béninoise, que « nos émissaires ont délibérément opté pour une solution chère pour avoir suffisamment de margarine et se beurrer confortablement le pain » ?
Impossible de corroborer ces affirmations : à la première page des contrats d’armement figure généralement la mention secret défense. Traduction en langage militaire : « Circulez, il n’y a rien à voir. »
Pourtant, les Béninois auraient dû se méfier : le « Patriote », patrouilleur à propulsion hydrojets acquis en 1988 par l’armée béninoise, n’a pas mis longtemps à devenir apatride : le rafiot a été cédé à un privé au bout de cinq ans de bons et loyaux services, à cause de nombreux défis qu’il posait en termes de maintenance.
Il est utile de savoir que la durée de vie de ce type de navire se situe généralement autour de vingt-cinq ans…
Quand on sait que les vaillants successeurs du Patriote n’ont pas pris la peine de souffler leurs cinq bougies avant de commencer à montrer des signes d’essoufflement, il y a de quoi s’inquiéter…
Commentaire d’un officier de la marine française, après les premiers déboires de nos patrouilleurs aux noms poétiques : « Si c’est avec des engins de ce type qu’ils veulent combattre la piraterie, vos pirates ont de beaux jours devant eux et peuvent se frotter les mains. »